Le rythme burkinabé
Depuis mon arrivée,
j’apprends à m’y adapter. Certaines situations sont plus faciles à gérer que
d’autres sur ce rythme et la chaleur nous l’impose de par son intensité. Tout
est plus lent et long. Au travail, nous le remarquons de manière fulgurante. Le
rendement, l’efficacité et la productivité avec lesquels nous
avons l’habitude de fonctionner au Québec ne sont désormais que de
lointains souvenirs. Même le cerveau est au ralenti, car il est même difficile
de réfléchir par cette chaleur! Mon cerveau est tout simplement en jello! De
midi à trois heures, lorsque le soleil est à son plus haut et que la chaleur
est à son comble, la ville fait la sieste. Il se passe mille et une choses dans
une journée et tout est digne d’anecdotes, car tout est nouveauté et
adaptation. Par ailleurs, l’une des nombreuses choses m’ayant marquée à mon
arrivée lors de notre premier tour de ville c’est l’organisation dans le
désordre. Comment qu’à première vue, tout semble chaotique dans la ville, dans
la circulation, dans les marchés... Mais qu’au bout du compte, tout s’imbrique
et fonctionne dans le chaos.
Prise de conscience
Après maintenant
deux mois, je peux dire que je me suis adaptée lentement, mais sûrement! Moi
qui croyais avoir un sens de l’adaptation à toute épreuve, j’ai été servie et
plutôt surprise, car celui-ci m’a abandonné durant la première portion du
voyage! Au début, peu importe la direction vers laquelle je regardais, je me
retrouvais en genre de choc culturel : les chèvres empilées une sur
l’autre dans un chariot derrière une voiture, toutes les mains à serrer et tout
le monde à saluer lors d’une balade dans la rue (car être blanc ça attire
l’attention sur un temps!) un trou public pour aller au petit coin… Mais à la
mi-stage, nos discussions de groupes m’ont fait réaliser plusieurs choses. Même
si je vis des montagnes russes d’émotions, il est important de vivre tout à
fond. Mes copines stagiaires m’ont aidée à remarquer que j’observais mon
nouveau monde à partir de mon cadre de référence québécois. Il a donc fallu que
je mette cette « switch » à off afin de voir ma nouvelle vie
burkinabé d’un autre œil. J’ai renvoyé la Jo-Anna avec ses difficultés d’adaptation
au Québec pour la remplacer par une qui transforme une expérience qui peut
paraître négative à première vue en positif, car oui, il y a du positif dans
chaque situation. C’est à partir de cette prise de conscience que mon voyage
s’est littéralement transformé en expérience de croissance personnelle. Et le « timming »
a été bon, car quelques jours après je me retrouvais hospitalisée pour la
première fois de ma vie. Bien que j’ai maintenant une blessure de guerre africaine
sur le bedon (j’ai dû me faire opérer pour retirer mon appendice), mon séjour à
l’hôpital m’a permis de remarquer à quel point je peux être forte et de saisir
le plein sens d’une expression burkinabé : « y a pas de soucis! ».
Cela fait deux mois que nous sommes ici et je me sens comme une Jo-Anna plus
forte et améliorée sur plusieurs aspects. Je ne suis plus la même. Cette
expérience m’a totalement transformée et endurcie.
La fois où je me
suis fait opérer en Afrique
Une forte fièvre et
de puissants maux de ventre m’ont prit durant la nuit. Le lendemain matin, ma
collègue de coopérative et amie Manon venait me chercher en taxi pour me
conduire à l’hôpital, car j’éprouvais maintenant des difficultés à respirer et
des douleurs au foi. À mon arrivée, j’étais plutôt en pleure et en panique
(j’en faisais de la haute pression). Je me suis fait prendre en charge
rapidement et professionnellement par les médecins et infirmiers de l’hôpital.
Dès lors, j’ai saisi le plein sens de l‘expression « chaleur humaine ».
Tous se sont mobilisés pour soigner la « nassara », mais malgré les
antidouleurs j’avais toujours très mal. Une
autre caractéristique significative de mon expérience c’est qu’on parle la même
langue, mais nous ne parlons pas le même langage. Alors, se faire comprendre et
saisir ce que notre interlocuteur essaie de nous dire, c’est l’un de mes défis.
C’est d’ailleurs assez particulier à vivre pour une fille qui étudie en
communication! Alors après une échographie, un scanneur et quelques moments de
paniques lorsque je me suis fait annoncer que je devrais me faire opérer pour
l’appendice à des milliers de kilomètres de chez moi, j’ai pris de grandes
inspirations, fait certains appels au Canada et je me suis calmé, j’ai été
forte et j’en suis fière. Bien qu’ici tout soit plus lent, j’ai appris à 17 h
que l’intervention aurait lieu à 20 h. Ma famille burkinabé, l’équipe du CECI
terrain, mon accompagnatrice et un représentant du ministère des Relations internationales
m’ont visités pour m’apporter courage et support. C’est sur la table d’opération
que j’ai appris que l’anesthésie serait générale et non locale et c’est à peine
réveillée de cette anesthésie qu’un médecin et qu’un anesthésiste me demandait
mon numéro de téléphone (oui oui, ici le moment est toujours bon pour faire la
cour). Après cinq jours d’hospitalisation, je suis rentrée à la maison où ma
famille a été aux petits soins avec moi! Deux semaines après cette
péripétie je vais bien mieux et je peux recommencer à vivre tout à fond!